Le PLR a toujours soutenu l’aide indirecte aux médias, telle que des coûts réduits pour la livraison de journaux et de magazines, ainsi que la loi fédérale sur la radio et la télévision (LRTV). Le projet actuel va cependant bien plus loin que ça, ce qui en fait une loi sur les médias désastreuse. Alors que dans le cadre de l’aide indirecte, 120 millions de francs par an sont prévus, l’aide aux médias sur laquelle nous voterons le 13 février prochain arrose abondamment tous les types de médias – sans distinction – et n’offre pas davantage d’espace aux médias privés. Cette politique de subventionnement basée sur le principe de l’arrosoir pour ce qui est soi-disant le « quatrième pouvoir » est dérangeante. Si les médias ont besoin d’une perfusion de l’État pour survivre, ils perdent leur indépendance.
Des maisons d'édition bien placées
Mais pourquoi cet appel à l’argent de l’État ? Au vu des résultats solides des maisons d’édition, c’est une question qui reste sans réponse. Les grands groupes de médias ont réalisé de solides bénéfices ces dernières années malgré la pandémie. Il n’y a aucune raison d’avoir recours à des fonds publics supplémentaires. Même l’agence de presse ATS est en bonne santé financière. Certes, l’exercice 2020 se solde par une perte de 1,62 million de francs, mais les trois années précédentes ont enregistré un bénéfice total de 6,43 millions de francs. Tout récemment, en 2018, après la fusion avec Keystone, les actionnaires (maisons d’édition) se sont fait verser un copieux dividende exceptionnel de 12 millions de francs. Dans tous les cas, il n’y a pas lieu de s’inquiéter pour la SSR. Celle-ci continuera de recevoir 1,2 milliard de francs, indépendamment de la loi sur les médias. S’y ajoutent 180 millions de francs provenant du sponsoring et de la publicité.
Une manne financière pour les médias en ligne
La nouvelle culture médiatique dans le domaine des médias en ligne semble grotesque. La loi prévoit que pour chaque franc de chiffre d’affaires, le média recevra 60 centimes supplémentaires directement des caisses publiques, soit un total de 30 millions de francs par an. Les médias en ligne étaient-ils jusqu’à présent incapables de survivre sans argent public ? C'est dangereux et cela conduit aussi à une dépendance irréversible vis-à-vis de l’État.
« Les médias mordront-ils encore la main qui les nourrit ? Peu probable. »
La durée de la législation semble presque arbitraire, voire archaïque. D’ici à ce que celle-ci entre en vigueur et que la durée de validité de sept ans soit écoulée, nous serons presque en 2030. Dans un contexte extrêmement dynamique, le législateur fédéral définit donc un cadre juridique figé autour des médias jusqu’à la fin de la décennie. On ne peut qu’en être étonné quand on sait que ce n’est qu’en 2007, par exemple, que le premier iPhone est arrivé sur le marché et a complètement bouleversé le monde des médias. Qu’en sera-t-il dans cinq ans ou même en 2030 ? Personne ne le sait vraiment. Le fait est que cette loi rigide ne pourra jamais suivre le rythme de l’évolution des médias. Il y a un risque d’immobilisme. Mais le fait est aussi qu’en Suisse, une fois qu’une subvention est introduite, elle n’est plus jamais supprimée. C’est pourquoi dire NON à cette loi sur les médias mal conçue et rétrograde est essentiel pour le bon fonctionnement du quatrième pouvoir de l'État. Seuls les médias indépendants mordent encore. Parfois, ils me font mal à moi aussi. Et c’est très bien ainsi.
Christian Wasserfallen, conseiller national BE