Un peu de contexte
Cette initiative, lancée par l’UDC, souhaite inscrire dans la Constitution la primauté de celle-ci sur le droit international. En filigrane se cache l’envie chez les ténors du parti agrarien de ne pas revivre un post-9 février et ce qu’ils estiment être un affront à la volonté populaire. Plus précisément, l’idée a émergé à la suite d’un arrêt du Tribunal fédéral datant de 2012 quant au renvoi d’un délinquant étranger. Une exception insoutenable pour les initiants et qui justifie selon eux une initiative complètement disproportionnée.
Celle-ci demande qu’en cas de contradiction entre notre Constitution et un traité international, ce dernier devra être renégocié ou au besoin dénoncé et résilié. Cela concerne tous les traités futurs, mais également actuels, soit, qui ont déjà été signés. Seuls ceux qui ont fait l’objet d’un référendum et le droit international impératif sont censés échapper à cette règle. Cette initiative est problématique à plusieurs niveaux et contrairement à ce que prétendent les initiants elle n’éclaircit pas les relations de notre pays avec les acteurs internationaux, bien au contraire.
Notre souveraineté est déjà garantie
Cette initiative crée des problèmes là où il n’y en a pas. En effet, les différents processus politiques à l’œuvre dans notre pays garantissent aujourd’hui que les traités internationaux signés soient conformes à notre Constitution. Il existe plusieurs garde-fous pour cela : consultation des cantons, approbation des deux Chambres fédérales, référendum obligatoire ou facultatif… Les quelques – rares – cas de contradiction entre notre Constitution et le droit international se sont produits à la suite de l’acceptation d’une initiative populaire. Mais là encore, la Suisse dispose de mécanismes afin de régler les différends avec pragmatisme et dans le sens de ses intérêts. Or, cette initiative va non seulement éliminer cette marge de manœuvre et créer un flou juridique, mais également instaurer un « automatisme » qui va à l’encontre des intérêts de notre pays. Aujourd’hui, chaque situation est traitée et négociée au cas par cas, dans le sens des intérêts de notre pays. Cette initiative va détruire cette manière de fonctionner alors qu’elle a fait ses preuves. Elle n’éclaircit donc pas nos relations avec le droit international, pis, le flou juridique créé va alimenter une défiance permanente et instaurer un climat néfaste dans nos relations avec les acteurs internationaux.
L’acceptation de l’initiative est dangereuse et non son refus
Les initiants brandissent la menace de la disparition de notre souveraineté et de notre autodétermination en cas de refus de cette initiative. Ceci est exagéré – et faux – pour plusieurs raisons. La Suisse est un petit pays : petit territoire, peu de matières premières et peu d’habitants. Si elle souhaite avoir un poids dans le commerce et les relations internationales, elle se doit d’être un partenaire intéressant, fiable et professionnel. Les accords internationaux permettent à notre pays d’être un acteur reconnu et respecté ; si la loi du plus fort régnait, ce n’est certainement pas la Suisse qui en tirerait le plus d’avantages. Ainsi, c’est en étant intégré dans le réseau international que notre pays peut défendre ses positions et ses intérêts, rien ne sert d’être souverain si l’on est seul et isolé. De plus, notre pays dépend également des approvisionnements, des importations et des exportations, rendus possibles parce que des accords internationaux de commerce sont signés et respectés ! Par ailleurs, la Suisse et le peuple suisse n’ont pas attendu cette initiative pour exercer leur souveraineté. Pour finir, les relations avec l’UE ont été construites en demandant l’avis populaire : accords bilatéraux, coopération avec les États de l’Europe de l’Est, passeport biométrique ; tous ces sujets sont passés devant le souverain.
La campagne des initiants se fonde sur la peur et diffuse une menace inexistante. Ne vous laissez pas avoir par de belles paroles : notre pays a été, est et restera souverain si le peuple rejette cette initiative le 25 novembre. Alors, votons Non !