Quelques semaines se sont écoulées depuis ton élection à la présidence du groupe parlementaire. Comment as-tu vécu cette période ?
C'est un nouveau défi exaltant… dont l’entrée en fonction est rapide : 10 jours entre l’élection et le début de session. Il faut donc s’organiser pour assumer cette responsabilité et mettre toute son énergie au service de l’équipe PLR du Parlement. J'ai beaucoup de plaisir à assumer ce rôle et je remercie les collègues de leur confiance. Ce qui me plaît le plus, c'est le côté très humain de la fonction : il y a de nombreux échanges, avec les membres du groupe, les conseillers fédéraux, les représentants des autres partis, les milieux économiques, les associations, l’administration, …. Et la fonction nécessite de garder un œil sur l’ensemble des thèmes politiques, pas seulement ceux de sa propre commission.
Tu es spécialiste de la politique étrangère. Cette large couverture thématique constitue-t-elle un défi particulier ?
C’est vrai que je connais bien la politique étrangère et européenne. Mais cela fait vingt-cinq ans que je fais de la politique et auparavant, je me suis beaucoup occupé d’autres thèmes : politique sociale, formation et recherche, finances et fiscalité, … Et en tant que membre de la Commission des institutions politiques, je suis plongé dans thèmes liés à la migration, la démocratie, la protection des données. Je trouve important de rester un généraliste en politique : chercher l’intérêt général c’est aussi garder une bonne vue d'ensemble pour viser les bons équilibres. Et je suis quelqu’un qui se passionne pour beaucoup de sujets, ça correspond donc bien à ma manière de faire de la politique.
Après plus de 25 ans, tu es le premier président de groupe issu de Suisse romande. Qu'est-ce que cela signifie pour le groupe ?
Il ne faut pas surestimer cet aspect. Mais cela fait cinquante ans qu'il y a une alternance presque systématique entre latins et germanophones à la présidence du groupe PLR, les deux dernières fois les latins étant des Tessinois, Fulvio Pelli et Ignazio Cassis. Cette alternance est saine car elle permet de représenter les différentes cultures dans les instances du parti. Cela me semble respectueux des valeurs qui font la Suisse : l’intégration des minorités. D'autant que 40% des élus du groupe sont issus de Suisse romande ou italienne. Mais à la fin, qu’on soit romand, italophone, alémanique ou romanche, ce qui compte c’est le travail pour porter les valeurs PLR, assurer la cohésion du groupe et l’intégration de tous.
Au sein du groupe libéral-radical, il y a traditionnellement beaucoup d'opinions différentes et fortes. Comment gères-tu cela ?
Nous sommes un parti de liberté. C’est donc normal qu’il y ait des nuances et de positions différentes qui s’expriment, surtout au début d’un processus politique. Ce n’est rien de neuf ! Nous venons de rendre hommage à l’ancien président du Conseil national, Franz Eng qui s’est éteint au bel âge de 94 ans. Lorsqu’il était président du groupe, à la fin des années 1970, il y avait déjà ce même défi, Kurt Fluri l’a rappelé dans son éloge. Il est important que tout le monde puisse s'exprimer au sein du groupe. On débat. On s’écoute. Puis on cherche à se rapprocher pour ensuite défendre une position commune. C’est ça la Suisse, cette intégration des nuances et des différences, la recherche des points communs. Et si on ne le trouve pas, on vote. Mon rôle est de trouver le bon équilibre entre ces phases.
Quelles sont tes priorités en tant que président de groupe ? Vas-tu donner une direction particulière au groupe ?
Je ne décide pas de la direction politique que prend le groupe : c’est le groupe qui la fixe dans le cadre du programme du parti. Ce que je souhaite, c'est que le groupe agisse comme une équipe unie et solidaire. Nous ne sommes pas que la somme de 41 individus, mais une équipe PLR, porteuse d’une responsabilité et de valeurs communes. C'est la seule façon d'être forts. Finalement la politique ressemble au sport : il faut un esprit d'équipe pour gagner, additionner les talents individuels et penser au collectif. C'est pourquoi je veux créer un espace de discussion lorsque les opinions divergent. En bref, ma priorité est que nous fonctionnions comme un team soudé dans lequel chacun trouve sa place.
Et dans cette équipe, tu es le capitaine ?
Je suis le coach qui motive, recadre au besoin, rappelle les règles de l’équipe et organise le travail.
Non seulement le groupe parlementaire est une équipe, mais aussi la présidence du groupe avec Daniela Schneeberger, Hans Wicki et toi. Comment fonctionne la collaboration ?
Très bien ! La mayonnaise a tout de suite pris. Hans Wicki est expérimenté, constructif et très agréable. Il a son rôle de président du groupe du Conseil des États, qui est bien sûr intégré au groupe parlementaire, mais qui conserve sa propre dynamique et son fonctionnement. Et j'ai été très heureux de l'élection de Daniela Schneeberger comme nouvelle vice-présidente. Elle exerce sa fonction avec beaucoup de dynamisme, d'expérience, de loyauté et un grand engagement. Et, ce qui ne gâche rien, les deux ont un grand sens de l’humour ! Nous aussi allons former une bonne équipe.
Nous sommes actuellement dans la deuxième moitié de la législature. Quels sont tes objectifs avec le groupe jusqu'à la fin de la législature ?
Nous voulons continuer sur notre lancée et poursuivre les objectifs fixés en début de législature. Les thèmes de la sécurité et de l'approvisionnement en énergie restent centraux. Ils ont gagné en importance et en visibilité en raison de l'actualité. Bien entendu, assurer un financement pérenne des assurances sociales est également une priorité et les questions économiques et fiscales restent centrales afin de favoriser la création d'entreprises, permettre l'innovation et créer des emplois. Ces efforts ne sont pas nouveaux, mais l'actualité leur donne encore plus de poids et le PLR est crédible et attendu dans ces domaines. Il nous appartient de rendre visible notre travail aux chambres fédérales. Le groupe a une fonction charnière : intégrer la stratégie du parti dans le travail parlementaire.
Les élections fédérales auront lieu dans un an et demi. Que peut faire le groupe libéral-radical pour que le PLR gagne ?
Continuer à travailler comme nous l'avons fait jusqu'à présent, être unis, proactifs, et encore mieux faire connaître notre activité. Je suis en outre convaincu que l'ancrage local est important. Nous avons récemment obtenu de bons résultats lors de différentes élections cantonales ou communales. Dans ce contexte, il est important que les parlementaires fédéraux restent en contact avec la population, aussi p.ex. lors de la distribution de flyers ou la collecte de signatures pour l'imposition individuelle. Les élus libéraux-radicaux connaissent la population et ses préoccupations et peuvent relayer ses préoccupations. Les membres du groupe doivent donc être présents dans leur canton, sa vie économique, culturelle et sociale et les activités de leur parti cantonal.
La proximité entre la politique et les citoyens est donc un avantage ?
Absolument. La Suisse est l’un des seuls pays où il est possible de rencontrer des conseillers fédéraux en faisant ses courses ou en prenant le bus. Il en va de même pour les parlementaires, que l'on peut aborder sans problème, qui sont issus du pays réel. C'est très précieux. Les citoyens savent qu’ils sont entendus et que leur opinion est prise au sérieux. Nous devons maintenir ce lien fort.
Entre 2001 et 2005, tu as été président du groupe parlementaire du PLR au parlement cantonal neuchâtelois. L'expérience de cette période t'aide-t-elle aujourd'hui ?
Bien sûr ! C'est la même chose (rires). Bien sûr au Parlement fédéral, l’organisation est un peu plus complexe : il y a deux chambres, plusieurs langues, mais au final, le travail est similaire. Je dois veiller à ce que les discussions soient menées en interne, que le groupe soit uni et qu'il se batte pour obtenir des majorités. Même s'il y a des différences, le travail d'un Parlement est en principe le même partout. Du niveau communal jusqu’au Parlement fédéral.
Dans un passé récent, deux présidents de groupe, Pascal Couchepin et Ignazio Cassis, sont devenus conseillers fédéraux. Est-ce aussi une option pour toi ?
Il suffit d’un coup d’œil à la liste des anciens présidents de groupe pour voir qu’il y en a beaucoup plus… qui ne sont pas devenus conseillers fédéraux ! (Rires) Plus sérieusement, la question ne se pose pas : nous avons deux excellents conseillers fédéraux qui seront encore très longtemps au service du pays !
Propos recueillis par Marco Wölfli