J’ai longuement réfléchi avant de décider de raconter mon histoire familiale de manière aussi ouverte. Notre passé est marqué par des événements tragiques et profondément tristes. Et pourtant, il se termine bien, ce qui m’a poussé à partager notre histoire avec vous. Voici mon histoire, celle d’un ancien enfant réfugié en Suisse.
Dans les années 1970, ma famille a été victime des Khmers rouges au Cambodge. Autrefois prospère dans l’industrie textile, elle a tout perdu et a été contrainte de travailler dans les champs. Finalement, ils ont réussi à s’enfuir et ont été emmenés dans un camp de réfugiés en Thaïlande. Bien que mon père n’ait à l’époque aucun lien avec la Suisse, il savait qu’il voulait y commencer une nouvelle vie. Avant le déclenchement de la guerre, il avait appris à l’école que la Suisse aidait les plus faibles et offrait une chance à ceux qui voulaient s’intégrer. Ce souhait s’est réalisé et il est arrivé en Suisse avec une partie de sa famille, où il a obtenu l’asile. Pendant le génocide, de nombreux membres de la famille ont été assassinés, y compris mes grands-pères.
La décision de venir en Suisse s’est révélée être un choix décisif. C’est ici, en Suisse, que mon père a rencontré sa future femme – ma mère. Elle aussi avait fui les atrocités des Khmers rouges. Mes parents sont très discrets à ce sujet, car la douleur est encore profonde pour eux.
La décision de venir en Suisse s’est révélée être un choix décisif. C’est ici, en Suisse, que mon père a rencontré sa future femme – ma mère. Elle aussi avait fui les atrocités des Khmers rouges. Mes parents sont très discrets à ce sujet, car la douleur est encore profonde pour eux.
Ce jeune couple de réfugiés avait une vision pour ses enfants : qu’ils puissent grandir dans de bonnes conditions en Suisse, mais surtout qu’ils ne vivent jamais une période aussi horrible que celle des Khmers rouges. Pour réaliser cette vision, ils ont travaillé dur. Mon père travaillait de nuit, ma mère de jour, et ils ont construit, petit à petit, les bases pour que nous, la seconde génération, puissions vivre une meilleure enfance. Cependant, cela ne signifiait pas que moi et mes deux frères étions libres de faire ce que nous voulions pendant notre temps libre. Au contraire, nous avons très vite été intégrés dans l’entreprise familiale. Pour nous, il était naturel que toute la famille doive s’impliquer. Pendant que nos amis jouaient au football le week-end, nous, les trois enfants, aidions au restaurant. Cela nous a appris très tôt à prendre des responsabilités.
Après plus de 45 ans depuis que mes parents sont arrivés en Suisse, leur plan a réussi, et ils profitent maintenant de leur retraite bien méritée. Un de mes frères a repris le restaurant familial, l’autre travaille comme Data Scientist pour une grande banque suisse. Quant à moi, je travaille dans l’industrie de l’éclairage dans ma propre entreprise, que j’ai fondée avec mon meilleur ami il y a plus de 12 ans. Ma situation professionnelle en tant que copropriétaire de l’entreprise me donne la flexibilité nécessaire pour assumer diverses fonctions dans le système de milice. D’une part, j’apprécie ces différents rôles, et d’autre part, c’est ma façon de dire merci. Un remerciement sincère à la Suisse d’avoir accueilli ma famille dans le besoin. Un remerciement pour avoir accordé l’asile à environ 8 000 réfugiés indochinois entre 1978 et 1982, qui, autrement, seraient probablement morts dans ces pays communistes.
L’aide humanitaire a une longue tradition en Suisse. Cette tradition doit impérativement se poursuivre, et je m’y engage. Le 30 septembre 2024, avec Linda Camenisch (députée cantonale PLR), nous avons déposé une initiative parlementaire sur le thème de l’asile. Cette initiative propose une modification de la loi cantonale, exigeant que, à l’avenir, non seulement les communes, mais aussi le canton de Zurich, soient responsables de l’hébergement, de la prise en charge et de l’intégration des demandeurs d’asile en cas de flux exceptionnellement élevés de réfugiés en Suisse. Ce n’est qu’ensemble que nous pourrons relever les défis complexes du domaine de l’asile.
La Suisse doit revenir à ses racines et se concentrer à nouveau sur l’aide humanitaire. Nous avons besoin d’une politique d’asile qui aide les vrais réfugiés des zones de guerre et de crise. En arrêtant l’immigration illégale et en inversant cette tendance, nous créons de la place pour les personnes en besoin de protection. Par expérience et à travers ma propre histoire, je constate que les vrais réfugiés sont particulièrement motivés à apporter leur contribution à la société. De plus, ils font tout leur possible pour ne pas être un fardeau pour le pays d’accueil, la Suisse. Ils s’intègrent.
Par expérience et à travers ma propre histoire, je constate que les vrais réfugiés sont particulièrement motivés à apporter leur contribution à la société.
La Suisse peut se prévaloir de nombreux exemples d’intégration réussie de groupes de réfugiés. D’anciens réfugiés provenant de pays comme le Cambodge, le Tibet, le Vietnam ou encore le Kosovo (pour ne citer que quelques exemples) se sont établis professionnellement ici, ont réussi et jouissent aujourd’hui d’une large reconnaissance au sein de la société. Ces histoires de réussite démontrent qu’avec le bon soutien et la volonté de s’intégrer, ces personnes peuvent apporter une contribution précieuse à l’économie et à la stabilité de la Suisse. Elles sont la preuve que l’effort et la capacité d’adaptation peuvent, à long terme, mener à la reconnaissance et au succès.
Pour conclure, une anecdote : je voulais m’assurer que mes parents étaient d’accord pour que je raconte notre histoire familiale ici et j’ai demandé leur permission. Au cours de la conversation, mon père m’a dit avec fierté qu’il avait même remboursé à la Suisse le vol du camp de réfugiés en Thaïlande vers la Suisse et qu’il avait toujours subvenu aux besoins de toute la famille lui-même.
Au cours de la conversation, mon père m’a dit avec fierté qu’il avait même remboursé à la Suisse le vol du camp de réfugiés en Thaïlande vers la Suisse et qu’il avait toujours subvenu aux besoins de toute la famille lui-même.
C’est maintenant à nous, au sein du PLR, de guider la politique d’asile dans la bonne direction, afin que les générations futures puissent elles aussi se souvenir d’histoires de réussite similaires.
Yiea Wey Te, Unterengstringen, 08.10.2024