L'initiative est justifiée par le fait que les rentes ne suffiraient plus pour vivre en raison de la baisse constante du pouvoir d'achat. Cet argument est trompeur pour deux raisons. D'une part, les rentes AVS sont régulièrement adaptées (au moins tous les deux ans) au renchérissement et à l'évolution des salaires. Une éventuelle perte de pouvoir d'achat est ainsi compensée. D'autre part, personne dans ce pays ne doit vivre exclusivement de l'AVS à la retraite, car les prestations complémentaires à l'AVS garantissent le minimum vital. Notre prévoyance vieillesse repose en outre sur trois piliers - l'AVS, la prévoyance professionnelle et la prévoyance privée - qui garantissent ensemble la sécurité financière lorsqu’on prend sa retraite.
Moderniser la prévoyance professionnelle
La génération actuelle de retraités dispose justement en majorité d'un deuxième pilier bien développé, car elle a exercé son activité professionnelle à une époque où la caisse de pension obligatoire était déjà introduite. Et pour les personnes qui ne disposent pas d'un deuxième pilier suffisant (par exemple parce qu'elles n'ont exercé qu'une activité professionnelle à temps réduit), il est crucial que nous modernisions la prévoyance professionnelle, et surtout les femmes. A l'avenir, il doit être possible pour les personnes ayant de petits revenus de se constituer un avoir dans le deuxième pilier. Le Parlement a adopté une modification de la loi dans ce sens, nous voterons également sur ce point cette année. Il s'agira alors de dire clairement oui.
"Ce sont surtout les classes moyennes qui seraient touchées par l'augmentation de la TVA ou les personnes actives, donc principalement les jeunes, par l'augmentation des charges salariales "
L'AVS déjà dans le rouge dès 2030
Mais revenons au prix de l'initiative syndicale. Dépenser 5 milliards de francs supplémentaires par an dans l'AVS est irresponsable. En effet, sans cette dépense supplémentaire, notre principale assurance sociale basculera déjà dans le rouge dès 2030. Plus problématique encore : les initiants ne disent pas comment ils comptent financer leur bienfait. Et la vérité est dérangeante : un pour cent supplémentaire de TVA ou une augmentation des déductions salariales de 8,7 pour cent aujourd'hui à 9,4 pour cent seraient nécessaires.
Une charge surtout pour les PME
Cette initiative est en fin de compte antisociale. Sans tenir compte des besoins effectifs, il s'agit de verser une 13ème rente à tous les retraités, y compris aux millionnaires par une politique de l’arrosoir. La classe moyenne serait particulièrement touchée par l'augmentation de la TVA ou les actifs, donc principalement les jeunes, par l'augmentation des charges salariales. Nous devons au contraire trouver dès aujourd'hui des solutions pour garantir l'AVS à long terme et de manière durable. Cela nécessitera déjà un grand effort et une grande disposition au compromis de la part de la société. Une extension de l'AVS sans but et non financée n'est en revanche pas responsable. C'est pourquoi je dis clairement non à l'initiative des syndicats pour une 13ème rente AVS.
Regine Sauter, conseillère nationale (ZH)